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Dernière semaine en Croatie, les fans et les groupies

Manisha

Après la mésaventure du 14 février j’avais décidé de me diriger à la mer afin de réparer mes caisses car elles sont faites de la même matière que les bateaux!

Nous avons commencé par passer un magnifique col pour redescendre vers Vrgorac.


Au village avant Vrgorac je commence à chercher de quoi nourrir les bêtes, on me déconseille de descendre dans la vallée car elle est inondée. Un jeune qui me sert encore de traducteur arrête les voitures et très vite se crée un petit attroupement. On me trouve du foin et un logement dans deux endroits différents. Les bottes chargées sur le bât, je suis escortée par une jeune femme jusqu’à mon logis. Elle est sortie de chez elle avec sa mère en me voyant passer car elle n’a jamais vu de chevaux de sa vie! Le garagiste qui m’accueille est un grand maigre adorable, qui vit seul ou avec ses filles. Il a un bout de pré qui n’est pas encore occupé par des carcasses de voiture.


Je suis spécialement reconnaissante de rencontrer cet homme après l’ivrogne de la veille car il me confirme qu’un homme peut se comporter normalement: nous mangeons en tête à tête mais il ne me fixe pas du regard et ne me parle pas à quelques centimètres du visage. Et surtout, il accepte quand je dis non à quelque chose.


16 février



Nous descendons à Vrgorac, j’y fais les courses et le plein d’essence (non pas pour le moteur 2 chevaux, pour mon réchaud) mais ne m’y attarde pas plus. Trop de photos.


Puis nous descendons dans une plaine verte et inondée, l’herbe y est rase mais quel bonheur de la voir!

Nous sommes encore l’objet d’un rassemblement du village, on offre de l’eau aux chevaux et c’est l’occasion de faire mille images. Mais quand les chevaux bougent c’est comme si on donne un coup de pied dans une fourmilière. Ils font peur ces grosses bêtes quand même! J’ai envie de camper dans cette plaine, histoire de retrouver ma tente et mon espace mais malgré mes recherches je ne trouve aucun coin suffisamment herbeux qui ne soit pas détrempé.

Alors je tire jusqu’à Staševica où on commence par nous recevoir avec peur et froideur. Je demande à d’autres passants qui m’envoient à une petite baraque blanche où une grande et grosse dame me répond avec comique et sans hésiter qu´ils ont bien de quoi nourrir mes chevaux. Je rencontre son mari, il nous fait entrer dans un petit enclos devant lequel se forme l’habituel attroupement. Un des hommes me propose une chambre chez lui, une fois les chevaux débarrassés du matériel et nourris je le suis. Mais sa femme est sa mère sont terrorisées par Haku, il n’est évidemment pas accepté dans le couloir ni même devant la maison. Du coup je décline l’invitation, je crois que les femmes sont soulagées. Et je me retrouve chez la femme rigolote et son mari, qui ont aussi trois garçons. J’adore passer la soirée dans cet endroit tellement improbable. Cette famille extra bruyante et extra vivante vit dans une maison de deux pièces, ils dorment tous dans la même chambre voir tous dans le même lit. Il y a un mini salon où la télé crie, le canapé où les enfants jouent sur le smartphone de la famille et une petite cuisine ou l’on cuisine sur le feu. La salle de bain est dehors, la douche est simple: une baignoire que l’on rempli d’un fond d’eau tiède, il n’y a pas de pommeau de douche. La femme tient à me prêter ses habits, je passe la soirée dans ses vêtements qui font deux fois ma taille, ce qui la fait beaucoup rire. Elle s’exprime d’une façon très théâtrale, on se taquine sans cesse avec les garçons. C’est joyeux.

17 février

Nous devons encore passer un petit col pour arriver à la mer. Je la suis depuis si longtemps sans jamais la voir!

En route, un homme enthousiaste m’indique où l’on répare les bateaux, et nous voilà à la mer.


La première personne à qui je m’adresse est par hasard le réparateur de bateau. Lui n’a pas le temps de m’aider mais sa femme part chercher le matériel en ville et revient me montrer comment procéder. Quelle chance j’ai!


Je suis sensée attendre plusieurs heures que ça sèche mais l’après-midi avance alors je décide de recharger Tao avec beaucoup de précaution. Mauvaise idée, je m´en mets partout, heureusement que j’ai embarqué le matériel restant pour finir le travail.

Je traverse Ploče en espérant trouver un bivouac juste après la ville. La pluie menace, ce qui est problématique avec les caisses pleines de polyester mi-liquide, et puis la police m’arrête. Pour la première fois ils contrôlent les papiers des animaux et semblent chercher la petite bête. Mais ils me laissent finalement partir assez vite, ouf!

Je dresse le campement au bord d’un canal, il se met à pleuvoir. J’ai vraiment l’impression de camper dans la ville!

18 février

Le paysage est totalement différent des dernières semaines. Nous marchons dans un delta et le long de champs et de vergers. Il fait très chaud, même les mouches sont de la partie.



Avant Metković le paysage devient plus habité. Les gens sont euphoriques de nous voir, je traverse le premier village avec un cortège.

On exige parfois que je m’arrête pour la photo, ce qui me tend. Quelques kilomètres avant la ville je demande dans quel pré (il y en a partout) je peux mettre mes chevaux. On m’en indique tout de suite un, on rempli mes gourdes, on m’offre du thé et des fruits. Et on me laisse étonnement tranquille ensuite, seul le petit garçon passera la soirée à me faire coucou depuis son jardin.

19 février

Le réveil aux premières lueurs du jour est purement instinctif. Je sens qu’il y a un problème, tends l’oreille et j'entends des fers sur la route. Je saute dehors, attrape une corde, le fil du parc est soulevé à un endroit et les chevaux ne sont plus là. Je les retrouve dans un beau pré plein d’herbe un peu plus loin, je les ramène et répare le parc. Sauf que quand je m’apprête à retourner me coucher un moment je vois Tao marcher droit sur le fil et passer à travers comme s’il n’existait pas. Cette fois les deux chevaux partent au grand trot, moi derrière mais je dois m’arrêter quelques secondes pour attacher vaguement mes chaussures et me fais distancer. Ils disparaissent de ma vue, et réapparaissent sur la grosse route. Je coupe à travers champs, cours sur la route où les voitures nous évitent. Heureusement Tao fini par ralentir jusqu’à s’arrêter, ils n’auront pas fugué plus d’un kilomètre. Je les attrape sans peine et les attache dans le pré, le temps que mes poumons brûlant se calment. Au moment de démonter le camp, je les relâche sous surveillance en pensant qu’ils sont passés à autre chose. Hé non, Yaméa retourne au fil, attend que Tao le casse pour ressortir. Mais cette fois je prends simplement la longe à Tao que j’ai laissé traîner par terre, et je ne les détacherai plus. Mais je me fais du soucis pour la suite.

A Metković, direction l’hôpital section teste covid. Sur la route une femme m’interpelle en allemand, elle m’attendais. Elle m’invite pour le petit déjeuner et le journaliste du coin passe faire un petit interview. La visite est écourtée car après le coup de fil à l’hôpital on sais qu’il faut se dépêcher. Mais Mila restera en contact avec moi et m’apportera beaucoup d’aide, à commencer par me donner le contact pour le soir à Vid. Au drive in covid on me supplie de passer avec les chevaux, pour les photos. On me graille le nez plus que de raison pour prendre plusieurs angles de vue, et on s’arrange pour me faire payer moitié prix. Le reste de la traversée de Metković est ainsi: c’est l’émeute, c’est l’euphorie. J’en tire des bénéfices et beaucoup de désagréments.



Je fini par fuir mais c’est trop tard, nous sommes sur tous les réseaux et des gens partent à notre recherche pour... prendre leurs enfants en photo avec ces animaux qu’ils n’ont jamais vu en vrai.

Ana me retrouve à l’entrée de Vid, une seconde après c’est une nuée d’enfants. Ils « m’aident » à chercher le meilleur coin d’herbe, et je n’ai jamais eu autant de paires d’yeux qui me regardent monter le campement.

Je n’ai pas pu me résoudre à laisser mes chevaux fugueurs pour toute la nuit, mais j’ai accepté l’hospitalité de la merveilleuse Ana pour la soirée. Ça m’a fait du bien de rencontrer quelqu’un avec qui on se comprenait si bien.


20 février

J’ai très mal dormi et me suis levée aux aurores. Nous devions passer la frontière avec la Bosnie. Ana m´a apporte le petit déjeuné et mon tas d’habits propres! Un garçon m’avait discrètement suivi de Metković à Vid sur son petit vélo la veille, il était de retour ce matin. Et j’ai compris qu’il m’accompagnerait, mais je ne pensais pas jusqu’à la frontière! J’avais été choquée par la perfection de l’anglais de certains enfants, lui en faisait partie. Nous avons longé un marais immense et nous sommes montés dans la montagne. Lui poussait son vélo, et parlais si doucement que j’avais du mal à le comprendre. Peu avant la frontière nous sommes arrivés à l’entrée de l’autoroute. J’avais repéré sur ma carte que je n’avais d’autre choix que de passer par là. Nous avons essayé de longer l’autoroute par une piste mais impossible ensuite de rejoindre la douane, tout était barricadé.

Alors, de retour sur l’autoroute j’ai demandé à mon jeune compagnon de rebrousser chemin, nous étions passablement illégaux.

Côté croate de la douane, tous connaissaient notre histoire. D’ailleurs ça n’a choqué personne que nous arrivions à pieds par l’autoroute. Il faut dire que grâce au covid il n’y avait pas de circulation. Il nous a fallut marcher encore le kilomètre séparant les deux douanes pour tester la température des policiers bosniaques. Ils étaient assez sérieux mais pas antipathiques, et les contrôles et remplissages de papiers se sont fait sans problème. J’attendais le moment où on me demanderait l’autorisation sanitaire pour transport d’animaux vivants, et le moment où le vétérinaire viendrait contrôler l’état de santé de mes compagnons. C’était bien pour cela que j’étais descendu tout au sud, précisément à cette douane. Mais personne ne m´en a parlé et je me suis bien retenue de poser des questions. On m’a simplement demandé avec beaucoup de bienveillance de sortir à la prochaine sortie, comme si j’allais continuer sur l’autoroute. Ouf!


Ce soir la nous avons trouvé refuge chez un couple adorable, les premiers à qui j’avais demandé du foin.

Le luxe c’est qu’ils avaient un pré clôturé!


Le lendemain, 21 février, nous avons marché sous une chaleur peu habituelle jusqu’à Međugorje où j’étais attendue par une amie à Mila. Et surtout où je devais retrouver mon papounet adoré le lendemain!!! J’étais terriblement excitée.

La journée fut belle.


Nous sommes arrivés chez Seka et Kruno où logeait le sympathique Marco, nous avons été traités comme des rois avec beaucoup d’humanité.

Seka tenait à aller chercher papa elle même à Mostar, j’ai enfin pu faire un câlin doux doux et plein d’émotion à un être aimé!

D’ailleurs, c’est lui qui va vous raconter la suite des aventures.

 
 
 

3 Comments


Adela Tintore
Adela Tintore
Apr 03, 2021

Quelle émotion, Manisha ! Merci de partager tout cela. Bise bises.

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Nad
Nad
Apr 02, 2021

Hello Manisha, je lis et écoute tout tes post... les photos sont magnifiques, tes récits sont incroyables ☺️ Je suis tellement admirative de ton courage pour cette aventure 👍 😘😘😘

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mahesh.bijoutier
mahesh.bijoutier
Apr 01, 2021

Aïe... c'est moi sur le ring! bon, on y va!

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